La vision de l’art m’est personnelle. Je m’applique à me tenir hors des conventions. Cela implique chez moi l’approche des sciences humaines et sociales. Mon parcours atypique, déscolarisé avant l’obtention du bac, enfin, de son équivalent belge, j’ai bataillé dur pour suivre ma voie. Titulaire à présent d’un DNSEP arts,j’éprouve le besoin d’entreprendre à la suite un doctorat, qui me permettrait de me structurer un peu plus dans un processus de recherches entrepris voici trente années.
Le propos de mon labeur est résolument orienté sur un sujet polémique des sciences humaines et sociales : les rites d’agrégation des étudiants universitaires.

Le diplôme de départ semble me diriger vers les arts. La logique du thème voulant plutôt une légitimité scientifique afin d’être entendue. Fidèle aux propos d’Émile Durkheim en 1897, « Pour bien comprendre une pratique ou une institution, il est nécessaire de remonter aussi près que possible de ses origines premières.», j’ai opté pour une vision très large du sujet, et il m’est essentiel de pouvoir en proposer la lecture à la sagacité des experts, tout autant qu’en terme d’art. Car ma recherche tient pour une grande part des sciences humaines,tant par une approche immersive – comme en témoignent six carnets de croquis pris sur le vif, que par l’étude de documents et d’artéfacts issus de ces pratiques. Une année à la faculté de Sociologie à Rennes 2 en 2016 m’appris les bases de la méthodologie.
La pratique d’art fut pourtant à la source de la recherche, et doit en être aussi l’ultime étape.
Sujet de la recherche
L’esthétique des traditions étudiantes révèle une connivence avec la vie d’artiste. Que l’on évoque la Bohème dont l’apparence révèle une reprise des codes de vie des étudiants, des bals des Incohérents qui furent repris par les Associations Générales des Étudiants françaises. Que l’on observe les us des étudiants du Royaume de la Bazoche, corporation ayant vécue quatre siècles, et qui est à la base du théâtre de comédie moderne par son émanation de la troupe des «enfans sans soucy». Plus loin encore en invoquant les cultes à mystères de Bacchus, où le théâtre jouait déjà un rôle non négligeable, jusqu’aux origines pariétales révélées par les tribus les moins polluées par la modernité, nous montrant des similitudes réelles avec les pratiques bizutantes.

Peter Paul Rubens & Jan Breughel the Elder – Le banquet d’Achéloos [c.1615], crédit photo Gandalf’s Gallery sur Flickr.
L’artiste Commandant RoSWeLL
Mon orientation initiale, se fit par un cursus artistique secondaire à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, puis à l’Institut Saint Luc de la même ville. Une formation annexe en Bande dessinée auprès de MM. Philippe Foerster & Gérard Goffaux à Jemappes dont je suis sorti avec mention. Déjà à l’époque j’avais opté pour le pseudonyme d’artiste « Commandant RoSWeLL » pour raisons personnelles principalement. Ce surnomme permit toutefois de m’intégrer plus facilement dans les réseaux liés à ma recherche. Une formation en conception multimédia dans les années 2000 complète le bagage.
Un emploi d’intérim au Bozar à Bruxelles fait opérer un virage dans mon parcours artistique. L’exposition « La Belgique Visionnaire » qui fut la dernière exposition montée par Harald Szeemann, m’ouvrit un champ de possibilités jamais envisagé auparavant.
La passion d’une vie
La recherche que je mène est avant tout issue de la passion d’une vie :
C’est une recherche qui part à contre-courant des mentalités de notre époque, ce qui la rend d’autant plus intéressante à explorer. Mettre volontairement la sensibilité des autruis entre parenthèses afin de proposer une formule plus sociale.
Cette nécessité personnelle d’aborder ces traditions me prit en deux temps, d’abord en 1987, où sortant de la bibliothèque de l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, après une après-midi d’exploration des artistes et de leurs œuvres je m’en allais, penaud de me rendre compte que j’ignorais quoi peindre et quel serait mon sujet. C’est précisément à ce moment-là que je fis la rencontre du cortège étudiant de la Saint-Verhaegen. Ce fut une révélation. Il me fallut deux années pour approcher et intégrer ces mouvements afin d’en comprendre les rouages alors que je ne possédais pas la qualification nécessaire à intégrer l’université. Le second temps est la parution en 1993 du livre « Du bizutage des Grandes écoles et de l’élite» de Pascal Junghans et Emmanuel Davidenkoff. La sortie de cet ouvrage eut un fort impact médiatique, et parvint en Belgique où il fit polémique. Il semble être le point α ayant déclenché le processus de réprobation systémique des rites étudiants, ayant mené à la législation française de 1997.
Je compris alors que ma pratique se devait d’avoir un impact politique afin de démontrer que les actes commis dans les baptêmes, les bizutages, ne pouvaient se résumer à la volonté de perpétrer la douleur, qu’elle soit physique et/ou morale, sur autrui, ou à une volonté de vengeance. Tant d’années de fouille, de collection, d’immersion, mais aussi d’implication, d’expériences personnelles, d’analyses vierges de toute formation universitaire.Tout cela sans cesser de pratiquer l’art. Sur un autre plan, la recherche effectuée au sujet des traditions m’a permis d’être reconnu au titre honorifique de docteur (sans aucune valeur autre qu’interne), par les membres du Collège des Archivistes du Musée Belge des Traditions Estudiantines. Ils sont composés de passionnés collectant informations et artéfacts, et sont dépositaires du Fond Jean-Denys Boussart.

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